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Le Style-Gaston Baty

  • Photo du rédacteur: Hippolyte Broud
    Hippolyte Broud
  • 11 juil. 2022
  • 2 min de lecture

L’évolution dramatique occidentale oscille entre deux tendances, deux courants.


L’un de ces courant, qui découle des origines et qui est plus nettement “théâtral”, donne toute son importance au jeu, au rythme, à la musique, aux rythmes et aux couleurs, c’est à dire à l’acteur et au spectacle. Ce sont les représentations magiques ou liturgiques des primitifs, les mystères éleusiens, le mime de la décadence romaine, puis la commedia dell’arte, La Foire, le ballet et l’opéra classique, le mélodrame, la féérie, la pantomime des funambules, les productions actuelles de la plupart des metteurs en scène étrangers.


L’autre, qui apparait plus tard, donne toute sa place au texte, n’admet que par surcroît les éléments spectaculaires ou mimiques, et réduit l’art dramatique à un genre littéraire. Ce sont les comédies du déclin grec, les productions de l’humanisme renaissant, la tragédie française pseudo-classique et sa postérité bien reconnaissable sous de nouveaux vêtements, jusqu’aux “gens de lettres” contemporains qui écrivent pour la scène.


Du point de vue, non pas des arts plastiques ou de la littérature, mais du théâtre, l’une et l’autre de ces deux traditions sont également stériles. Elles peuvent, la première produire de magnifiques spectacles, la seconde faire naître d’admirables poèmes, mais sont incapables, séparés, de réaliser une oeuvre vraiment dramatique. L’art théâtral ne prend toute son ampleur, ne devient lui-même, que lorsque les deux courants se marient, comme la trame et la chaîne ne tissent l’étoffe qu’en se croisant. Alors, tout s’équilibre ; le texte n’accapare plus toute la place, et les éléments spectaculaires n’empêchent pas le texte de garder sa pleine valeur. Les collaborateurs, écrivains, interprètes, décorateurs, travaillent sur un pied d’égalité, dans la mesure où leur métier respectif peut servir l’oeuvre commune. Aucun ne s’arroge la première place ; chacun la prend tour à tour, au moment où l’expression cherchée réclame l’instrument dont il dispose.


Ce sont alors les grandes époques : la tragédie Athénienne, le mistère de la chrétienté, le drame élisabéthain. Ce sont aussi les grandes figures humaines en qui l’art dramatique c’est incarné : Eschyle, Shakespeare, Molière, comédiens et metteurs en scène qui se sont fait écrivains pour l’amour de leur métier.


Gaston Baty, Vie de L’Art Théâtral (1932) p 292-293



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